La feuille de menthe...
« La feuille de menthe, on l’a ajoutée pour faire joli »
Ce week-end, nous sommes allés au restaurant, les grands-parents de mon Aspie, son petit frère et moi-même. Le petit frère était fatigant (ce qui est rare, d’habitude c’est un ange), mon grand était assez cool, bien qu’agacé par son petit frère qui n’arrêtait pas de grimper sur lui.
La serveuse vient, prend commande, mon grand s’exprime comme d’habitude avec une grande précision, n’oubliant aucune formule de politesse.
La serveuse revient et s’adresse à lui avec son prénom. Il est ravi et nous - surpris !
Nous terminons notre repas, arrive le moment du dessert, le grand commande encore une fois avec sa précision à lui « de la glace au citron, deux boules s’il-vous-plaît Madame ». Elle le remercie, encore avec son nom et lui dit qu’il est mignon.
Il est, encore une fois, ravi et me demande trois fois si c'est bien de lui qu'elle parlait.
Elle revient avec les glaces dont celle au citron, décorée des inévitables biscuits (que personne n’aime), d’un quart de fraise et d’une petite feuille de menthe.
Avant de la poser devant lui, elle lui précise « la feuille de menthe et la fraise, on les a ajoutés pour faire joli, tu peux tout enlever si tu n’aimes pas ça. C’est de la décoration ».
Elle lui sourit et s’en va.
Là, j’en suis convaincue définitivement, elle a compris qui et quoi est mon grand garçon. Aucun doute possible.
J'enlève prestement les décorations puisque effectivement, il n’aime pas ça. Il aime ses glaces sans rien, ni déco, ni biscuit, ni rien et je prends la décision de remercier la serveuse à la sortie de son attitude incroyablement intuitive.
Mais encore une fois elle m’étonne positivement et prend les devants.
« Excusez-moi de vous le demander, mais il a quelle particularité exactement, votre fils ? Je suis éducatrice, j’aide juste ce soir ici, je travaille avec les petits, et je suis intriguée ».
« Il est Asperger ».
Mon fils, bien évidemment, demande « pourquoi, j’ai quoi ? »
Elle se penche et lui dit avec un sourire « tu sais, je m’occupe des enfants, et parfois il y a des enfants auxquels je m’attache particulièrement, et c’est pour ça que j’ai demandé à ta mère ».
Encore une fois, il est ravi. La serveuse avait « une bonne impression » de lui, le trouvait « mignon » et aurait pu « s’attacher particulièrement » à lui.
Que des appréciations positives.
Et elle l’a prise au sérieux.
Mon fils était radieux.
Et moi, bien évidemment, j’ai remercié la serveuse, j’ai également dit qu’elle avait raison d’avoir demandé quand elle semblait un peu gênée, qu’au contraire, qu’il fallait absolument poser la question. Je lui ai dit qu'elle avait dit précisément ce qu'il fallait dire pour mettre mon fils à l'aise, que c'en était impressionnant.
Nous sommes sortis du restaurant heureux de savoir que des gens comme cela existent. Surtout des gens dans l’enseignement.
Parce que cela est assez rare – malgré tout ce que l’on dit. J’ai souvent eu de la chance avec les instituteurs de mon fils. Mais je suis aussi mal tombée (je me souviens de sa deuxième AVSi, quand il était encore à la maternelle, une fille qui avait un master en psychologie…. rarement en 11 ans je n’ai rencontrée quelqu’un d’aussi con - veuillez pardonner le langage, mais c’est vrai, les études ne rendent pas les gens intelligents, elle a même réussi à se disputer avec le père de mon fils ce qui est quasiment impossible puisque c’est un homme calme et posé, plein d’humour, mais ceci est une autre histoire)
Pour en revenir à cette femme, elle n’était non seulement dans la profession qui lui convient, dans laquelle elle va exceller grâce à sa sensibilité, elle est également capable d’être intuitive et d’avoir les parfaites réactions, adaptées à la personne devant elle. Un don rare.
Lui parler directement, s’adresser à lui avec son prénom. Lui signaler que les décorations, ce n’est rien d’autre que ça, qu’on peut l’enlever, sans qu’il n’ait à le dire ou moi à le faire.
Me poser la question.
Un exemple à suivre.
Merci encore à cette femme qui ne lira certainement jamais ces lignes (d’autant plus que cela s’est passé en Allemagne).
Elle pourra changer beaucoup de choses avec sa sensibilité et sa bonté.
Si tout le monde était comme elle, les Aspergers pourraient s’intégrer sans le moindre souci dans la société, puisque leurs particularités seraient tolérées et acceptées, tout simplement.
Cela me donne de l’espoir : c’est possible !